Le rallye Dephy a eu lieu le 1er octobre sur 3 exploitations du réseau Dephy. Une vingtaine de partenaires de la recherche et du développement, acteurs du conseil et agriculteurs étaient présents pour échanger sur des sujets liés à des techniques innovantes permettant de réduire l’utilisation des produits phytosanitaires.

L’innovation par le couvert végétal, témoignage de Gaëtan Vecten

Une transition vers l’agriculture de conservation

Gaëtan Vecten travaille des terres très sensibles à l’érosion. Depuis une coulée de boue mémorable, il a orienté nettement sa ferme sur la voie de l’agriculture de conservation du sol. Réduction du travail du sol, couverture la plus permanente possible par des couverts végétaux ou des mulchs, rotation diversifiée et travail sur les successions culturales sont les 3 axes de travail suivis. Gaëtan implante ainsi depuis 2 ans des féveroles en semis direct dans un couvert végétal d’avoine qui suit une céréale. Le mulch d’avoine, qui est réputé inhibant les germinations, couvre le sol et les féveroles restent propres sans aucun désherbage ! Seules les fourrières qui ont été déchaumées se resalissent. Les intercultures courtes sont aussi mises à profit pour implanter des mélanges de féverole, radis, avoine…

Semer du blé sous couvert de trèfle violet

Les cultures porte-graines apportent une plus-value sur cette ferme où les pommes de terre ont été supprimées et les betteraves réduites (ces cultures déstructurent le sol et sont peu compatibles à ce jour avec l’agriculture de conservation). L’enjeu est ici d’arriver techniquement à concilier une implantation en blé avec le maintien jusqu’au printemps si possible d’une couverture végétale vivante sous le couvert de la céréale. Cette couverture végétale composée de trèfle violet d’un an concurrence les adventices, et comprend l’équivalent estimé de 100 unités d’azote, qui seront minéralisées plus lentement qu’avec un labour, et donc moins susceptibles d’être lessivées. Des essais d’implantation vont être réalisés:
Avec ou sans broyage du trèfle violet, avec un désherbage total plus ou moins appuyé (glyphosate seul ou avec une hormone), et un désherbage au printemps en fonction du développement du trèfle (avec une base de metsulfuron).
Des essais Arvalis laissent espérer un intérêt en rendement et protéines par rapport à un blé mené classiquement, ou par rapport à un blé dans lequel le trèfle serait détruit à l’implantation. La difficulté sera de réguler ce couvert sans le tuer ni pénaliser le blé.
L’évolution des essais sera rapportée sur ce blog.

semis direct

Le volume important de végétation est bien tranché par le semoir à disque. L’interrogation porte sur la capacité du blé à lever malgré une végétation qui sera plaquée au sol après le désherbage

L’innovation par la biodiversité, témoignage d’Hubert Compère

Une conception positive de la biodiversité

Hubert Compère est depuis plusieurs années, très sensible à maintenir la vie dans ses parcelles. Il a adapté ses pratiques pour favoriser au maximum les populations d’auxiliaires et les services rendus sur la production. En fait Hubert Compère surveille plus ses auxiliaires que les ravageurs. En parallèle, le passage en non-labour et la réduction poussée des autres produits phytosanitaires (hormis les herbicides) créé un milieu favorable à la vie du sol qui est à la base de tout l’écosystème de la plaine, y compris macro faune, dont les populations de perdrix grises sont un bon indicateur. Grace à cette démarche l’agriculteur a pu se permettre de ne plus utiliser d’insecticides sur colza depuis 15 ans. Les bruches ne sont pas traitées non plus dans les féveroles, avec des résultats cette année supérieurs à ses voisins: 4 insecticides et 15 qx, contre 35 qx chez Hubert Compère, avec une qualité comparable voir supérieure en terme de taux de grains bruchés, de PMG et de grains tachés.

Associer des légumineuses au colza : zéro prise de risque pour un intérêt certain

L’agriculteur a semé cette année des colzas associés à des légumineuses, pour concurrencer les adventices (réduction possible des anti-dicotylédons de +/- 30% en fonction des situations), stocker de l’azote (ce qui rembourse l’investissement) et déboussoler les ravageurs du colza. Depuis 2 ans, des piégeages à l’automne ont montré qu’il pouvait y avoir moins d’altises et de charançons du bourgeon terminal dans les colzas associés. Ces résultats sont à confirmer, mais ils sont encourageants pour introduire encore plus de diversité végétale dans les parcelles.

couvert de colza associé

La culture semée le 23 août montre un beau développement. A vue de nez, la biomasse des légumineuses est égale à supérieure à celle des colzas, ce qui présage d’une belle économie d’azote

L’innovation par la mécanique, témoignage de Franck Guiard

Des bénéfices nombreux

Franck Guiard travaille sur une ferme située sur le bassin d’alimentation de captages de Landifay-Bertaignemont. La protection intégrée est présente dans ses pratiques depuis longtemps, avec des résultats très intéressants, puisqu’il est en moyenne à un IFT de – 50% par rapport à la référence régionale. L’acquisition depuis 2 ans d’une bineuse performante lui permet de diminuer encore les herbicides en parallèle avec une rampe de pulvérisation localisée de 6m. Utilisée en betteraves, cette combinaison permet en colza de réduire l’IFT herbicides de 60% par rapport à la référence régionale de 1,7. Economiquement, c’est une opération « blanche », car l’économie d’intrants paie l’emploi de la main d’œuvre. Cependant, c’est pour l’environnement, l’eau et l’emploi local une opération très positive, sans compter de possibles gains de rendement avec moins de phyto-toxicité.

Une efficacité à bien maitriser

Les socs plats associés à des protège-plants sont efficaces sur dicotylédones jusqu’à 2 feuilles, moins sur graminées. Des herses peignes derrière les socs peuvent aider à ramener les adventices en surface pour les faire sécher. Un disque (installé sur le semoir) guide la bineuse, qui reste cependant sensible aux différences de nivellement.
Lors de la démonstration réalisée, l’efficacité sur jeunes dicotylédones (stade dicotylédons à 1 ou 2 feuilles) a été très satisfaisante, et nulle sur les graminées un peu développées. Il n’y avait pas de graminées au stade fil blanc à ce moment. Les protège-plants sont efficaces et ramènent un peu de terre au pied du plant. Les dégâts sont quasi-nuls pour les pieds de colza ayant dépassé le stade 3 feuilles.
Durant le passage de l’outil les participants ont pu apprécier la relative sensibilité du disque guideur à la trace précédente, qui si elle n’est pas bien profonde, risque de faire «dérailler» la bineuse avec les risques qu’on imagine!

binage

Des conditions ensoleillées et venteuses pendant 3 jours sont idéales pour dessécher les adventices

Contacts :
François Dumoulin, Chambre d’agriculture de l’Oise, Réseau Dephy Herbicides