Les dernières actualités ont mis en lumière le manque d’alternatives des agriculteurs à plusieurs produits phytosanitaires, alors que la réglementation européenne se durcit. Notre visite au Salon International de l’Agriculture à Paris a été l’occasion de découvrir des innovations et nouveaux produits vendus sur le marché. Parmi celles-ci, nous avons découvert AgriOdor, entreprise qui propose des alternatives aux insecticides. L’objectif est d’empêcher les actions des insectes nuisibles aux cultures en reproduisant des parfums naturellement émis par les plantes.

Le concept ?

Les insectes utilisent les odeurs pour localiser leur nourriture, leur lieu de ponte ou même éviter certaines plantes.

« 80% des insectes ravageurs au niveau mondial sont sensibles aux odeurs » (extrait du site AgriOdor)

Ene Leppik, ancienne chercheuse à l’INRAE de Versailles sur ce sujet, s’est donc spécialisée dans le développement de ces produits odorants, via le lancement d’AgriOdor en janvier 2019.

Son but ? Utiliser des odeurs naturelles pour développer des parfums attractifs ou répulsifs pour les insectes. Ces parfums ainsi utilisés dans les champs limitent ainsi la colonisation des insectes et donc les dégâts sur les cultures. Ces odeurs sont basées sur des kairomones et allomones.

Les avantages ?

  • Pas de résidu
  • Pas de toxicité pour la faune, la flore, ainsi que pour son applicateur
  • Produits souvent sélectifs à une espèce et donc pas d’incidence sur les autres insectes
  • Quasiment pas de développement de résistance

 

Et concrètement dans mes champs, en Hauts-de-France ?

AgriOdor développe aujourd’hui une solution pour lutter contre le puceron vecteur de la jaunisse de la betterave.

« Notre solution réduit la population de pucerons […] entre 50% et 70% », affirme Ene Leppik, co-fondatrice d’Agriodor. qui dispose à Rennes (Ille-et-Vilaine) d’un laboratoire spécialisé dans la conception et la réalisation de « blends » olfactifs, des mélanges d’odeurs. « La kairomone a pour effet de retarder les premières infestations de pucerons ailés, explique Tarek Dardouri, ingénieur R&D en écologie chimique chez AgriOdor. Cette faculté permet de reculer de 10 à 15 jours l’atteinte du seuil de nuisibilité du puceron sur betterave, à savoir 10% de plantes avec au moins un aptère vert. Notre blend a aussi pour effet de perturber l’alimentation et la reproduction des pucerons ». (Extrait de l’article de Plein Champ du 30/10/2023)

Une piste intéressante donc et qui serait disponible à la vente à partir des semis 2025. Restez à l’affût !

Pour plus d’informations, vous pouvez regarder cette vidéo. En attendant, d’autres produits sont disponibles pour la lutte contre le bruche de la féverole et de la lentille.

Phéromones, kairomones, allomones… Késako ?

La proximité des mots vous aura frappée à juste titre. Mais quels sont les points communs et différences ? On parle souvent des phéromones, mais peu des autres termes.

Les phéromones, kairomones et allomones sont toutes des substances chimiques impliquées dans les communications entre les organismes, mais ils ont des fonctions différentes :

  • Les phéromones sont des substances chimiques émises par un individu et perçues par un autre individu de la même espèce. Elles sont utilisées pour transmettre des messages et coordonner le comportement au sein de la population.

Exemples : Attraction sexuelle, signalisation de danger, délimitation territoriale, etc.

  • Les kairomones sont des substances chimiques émises par un organisme, mais elles sont perçues par un autre organisme d’une espèce différente. Elles bénéficient généralement à l’organisme émetteur au détriment de l’organisme récepteur.

Exemple : le parfum des fleurs qui attire les abeilles et aide ainsi à la reproduction de la plante

  • Les allomones sont des substances chimiques émises par un organisme pour lui bénéficier directement ou indirectement, généralement au détriment d’autres organismes. Elles peuvent avoir des effets répulsifs ou nocifs sur d’autres espèces et sont utilisées pour la défense, la protection contre les prédateurs ou pour éliminer la compétition.

Exemple : Les fourmis de l’Acacia émettent des allomones qui ont des effets nocifs sur les plantes voisines concurrentes. Cela favorise la croissance de l’acacia aux dépens d’autres plantes, utile pour leur source de nourriture et leur abri.

Certains composés chimiques peuvent agir à la fois comme kairomones et allomones. Leur classification dépend donc du contexte et des organismes impliqués dans l’interaction.