Aujourd’hui, notre équipe s’intéresse au GIEE Innov’Sol. Le groupe démarre sa troisième année de reconnaissance. Nous avons rencontré Aristide Ribeaucour, agriculteur dans le valenciennois et animateur du groupe.

D’où vient le projet Innov’Sol ?

A la base, c’était deux petits groupes d’agriculteurs. Certains étaient en polyculture-élevage et d’autres venaient d’arrêter les vaches pour se consacrer aux cultures. Le projet regroupe 13 exploitations entre Maubeuge et Maroilles dans le Nord. Le GIEE est présidé par François Bettens, agriculteur à Cerfontaine.

Leurs préoccupations étaient tournées vers l’agronomie. Ils voulaient trouver des solutions à leurs problématiques liées au sol

Que voulaient-ils approfondir ?

Les agriculteurs voulaient améliorer la qualité de leurs sols et réduire les problèmes importants liés à l’érosion. L’idée que des exploitants agricole travaillent sur ce sujet a d’ailleurs été bien reçu par la CAMVS (Communauté d’agglomération de Maubeuge Val de Sambre), la Communauté de communes du pays de Mormal et le Parc Naturel de l’Avesnois qui sont sur la zone du projet.

Aussi, les exploitations gèrent beaucoup d’effluents d’élevage, ce qui amène des questions d’ordre réglementaire et environnemental (directive nitrate). Mais surtout, il fallait trouver le moyen de valoriser au maximum l’azote organique présent dans leur système tout en minimisant le travail du sol.

Concrètement, quels sont axes de travail ?

Concrètement, nous avons commencé par faire ce qu’il ne fallait pas faire. C’est-à-dire partir vers du semis direct pur et dur !

Le but était faire prendre conscience aux membres que ce n’est pas que le matériel qui garantit la réussite des semis. Pour réduire le travail du sol, il faut d’abord faire de l’agronomie.

La rotation

La rotation est un point central de l’agroécologie et du semis direct sous couvert. Les cultures présentes sur les exploitations sont le blé, la betterave sucrière, le maïs, la pomme de terre, l’orge et le lin. Certaines d’entre elles ont un impact négatif sur le sol !

Chaque exploitation devait bloquer une parcelle pour réaliser les essais sur la durée du projet. Le but est d’allonger la rotation tout en maintenant une alternance entre les cultures d’hiver et de printemps.

D’ailleurs, le maïs fait parti des cultures principales des exploitations. Nous avons décidé de faire des couverts à forte biomasse puis de les détruire tôt afin de semer le maïs dans les meilleurs conditions. C’était un changement par rapport au ray-grass qui était récolté avant le semis du maïs.

Des agriculteurs m’ont interpellé car le maïs semé en direct est des fois moins haut mais lorsque l’on fait les pesés à l’ensilage, le rendement est souvent similaire

Semis couvert GIEE Innov'Sol

Connaître son sol

Pour connaître son sol, il faut l’observer. C’est dans ce but que nous avons réalisé beaucoup de profils de sol. Les agriculteurs ont également appris à faire des tests bêche afin d’être autonomes dans le diagnostic de la structure de leurs sols. Maintenant, à l’implantation de couverts ou du colza, le test est réalisé afin de vérifier si la structure est favorable ou si une fissuration est requise.

Aussi, le test du slip ou du t-shirt est un outil très visuel pour comprendre la fertilité de son sol et notamment la dégradation de la matière organique par les micro-organismes du sol.

Valoriser les effluents

Pour valoriser les effluents, il faut apprendre à les connaître. Le laboratoire Aurea a réalisé des analyses de fumiers et de lisiers. Le SATEGE a ensuite formé les agriculteurs aux différentes méthodes et meilleures périodes pour épandre. La plupart des membres ont choisi l’enfouissement via des outils à dent pour limiter au maximum la perte d’azote.

La place des produits phytosanitaires dans les itinéraires culturaux

Nous sommes allés vite sur la destruction des couverts sans utiliser le glyphosate. Tout dépend des contraintes des agriculteurs. Certains choisissent des couverts gélifs, d’autres le mulch ou encore le broyage.

La demande des agriculteurs était plutôt portée vers la connaissance des plantes, ce qui les affaiblit et ce qui les renforce.

Les macérations

Pour mieux connaître les macérations et leurs effets sur les plantes nous avons choisis de nous former auprès de Philippe Houdan agriculteur et spécialiste en macération. Il nous a expliqué le principe des macérations, quelle plante pour quel usage et comment les réaliser.

L’application de consoude a un intérêt pour améliorer la structure du sol

Dans le projet, nous travaillons essentiellement les macérations d’ortie, de consoude et de bardane.

L’utilisation de macérations permettent une augmentation de rendement dans les années seine et limitent les dégâts lors d’années pluvieuses.

Je tiens à rappeler que même si les macérations ont des effets positifs, cela ne remplace pas totalement un fongicide surtout lors d’une année à forte pression maladie.

Le redox

Les agriculteurs du groupe sont très curieux. Lorsque nous avons parlé de macérations, le terme de REDOX est souvent revenu. Le groupe s’est formé auprès de Baptiste Maître, conseiller en agronomie et spécialiste en fertilité des sols.

Le redox permet de mesurer l’énergie dans le sol et les plantes. En fonction de la météo et des pratiques culturales, le système est soit oxydé, soit réduit. Ainsi, la pluie oxyde les plantes alors que le soleil les réduit.

A la suite de cette formation, nous nous sommes muni d’une valise oxydo-réduction pour mesurer le redox en toute autonomie.

Le matériel

Travailler les réglages du matériel de travail du sol et de semis est primordial pour réussir. Également, nous nous sommes mis d’accord pour que les bennes restent le plus possible hors des champs en période de récolte (hors betteraves et maïs ensilage) et que les passages de traitement de pulvérisation restent les mêmes pour tasser au minimum le sol.
Enfin, nous avons fait une journée de formation où nous sommes allés sur l’exploitation de Julien Senez (Kiwi Agronomy) pour parler matériel, couverts, itinéraires culturaux et rotation. Une très bonne expérience pour tous les agriculteurs du groupe !

Est-ce que les agriculteurs souhaitent continuer le GIEE ?

Un renouvellement pour sûr ! Nous avons quelques thèmes en tête :

  • approfondir l’impact du matériel sur le sol
  • anticiper les retraits de matière active en trouvant des solutions alternatives (variétés plus tolérantes entre autre)
  • aller plus loin dans la partie économique jusqu’au calcul de marges à l’hectare pour montrer que l’utilisation de la charrue est consommatrice de carburant et de temps.

Ici, un essai de semis de maïs en strip-till après un couvert.

Matériel utilisé :

    • Tracteur: Fendt 826 vario
    • Trémie fontrale: Agrisem DSF 1600/2200
    •  Strip-till: Sly Stripcat
    • Semoir monograine: Väderstad Tempo V 6-12

Images :

Laurent Salmon

Musique utilisée: